Il faut que tout change pour que rien ne change. L’homme est sur le point de basculer dans une ère totalement nouvelle, bouleversant tous les paradigmes de son interaction entre lui, les autres et son environnement. Ce changement de paradigme a des répercussions profondes et étendues sur la façon dont nous vivons, travaillons et échangeons.

L’écosystème technologique dont l’homo sapiens s’est entouré, le complète et démultiplie ses possibilités. C’est l’homme post-moderne. Du fer à l’ordinateur en passant par le nucléaire, quelque soit le génie qui les anime, les inventions de l’homme sont parfois le plus grand danger pour l’homme. Si les progrès sont vastes, les menaces le sont aussi. C’est à l’aube de cette nouvelle ère que les règles doivent être posés. Le début du XXIe siècle doit être aux libertés numériques ce que la Révolution française furent aux droits de l’homme.

Tout change, mais la répression et l’autoritarisme restent une menace.

La surveillance et l’anonymat

Les entités ayant la capacité d’opérer une surveillance sur internet sont nombreuses. Contrôle du trafic, surveillance des utilisations, les opérateurs internet en premier lieu sont en mesure de collecter d’importantes quantités de données sur les comportements de leurs clients sur leurs réseaux. Stockées à des fins prétendument techniques, ces données sont contraires aux libertés individuelles dès lors qu’elles peuvent être réquisitionnées à l’amiable ou par la force, pour être retournées contre les citoyens.

Les réseaux sociaux divulguent des informations à l’insu de leurs utilisateurs qui se trouvent dépossédés de tout contrôle. Le plus simple des téléphones permet de traquer avec précision son utilisateur par simple triangulation.

L’ensemble des achats effectués peut être répertorié  au mépris du danger que peut représenter pour une personne la liste des livres qu’il lit.

Il est urgent de permettre aux citoyens sur internet de bénéficier de l’anonymat sans lequel leurs droits et libertés ne sauraient être préservés. L’architecture des protections juridiques des libertés mise en place sous les démocraties, aussi faillible qu’elle soit, se trouve toujours plus vacillante face aux nouvelles technologies.

La censure et lutte contre l’autoritarisme

Internet est un exutoire où communiquer, se cultiver et commercer. C’est l’incarnation globale de l’agora grecque. Désintérmédié et directe, internet rapproche les hommes plus qu’ils ne l’ont jamais été. On assiste à un changement de paradigme aussi important que le fut la Renaissance ou la Révolution industrielle dans l’histoire de l’humanité.

Ouverts aux vents de toutes les opinions, le numérique est devenu la nouvelle frontière de la lutte contre la censure. Les gouvernements peuvent avoir peur de l’opinion des citoyens, les organisations ne peuvent plus être certaines de leur impunité. Tout ce qui se sait, se diffuse inexorablement.

Le numérique a été un des fers de lance de la lutte contre les régimes autoritaires du Moyen-Orient et du Maghreb. Face aux succès des mouvements de résistance en ligne orchestrés depuis le monde entier, d’autres régimes en Iran, en Chine ou en Syrie vont être amenés à accélérer le déploiement de leurs systèmes de contrôle. Pour ces régimes, le numérique est à la fois une menace et une opportunité.

La surveillance des citoyens se déploie de manière silencieuse et pernicieuse par un ensemble de moyens sophistiqués. La vente et l’installation de système de surveillance par des sociétés dans une totale impunité est aussi lourd de conséquence que le trafic d’armes. Il est impératif que ce développement soit dénoncé, monitoré et contré.

L’âge du numérique offre des possibilités incroyables. L’utopie d’une démocratie pure n’est plus inenvisageable, tout comme le monde terrible de George Orwell décrit dans 1984 est à portée de main d’un accident de l’histoire. Située à la charnière de deux époques radicalement différentes, il ne tient qu’à la génération actuelle de mettre en place les structures institutionnelles. Qu’elles soient politiques, sociales ou culturelles, ces nouvelles structures devront s’adapter aux possibilités de l’homme post-moderne. La première étape est une révision de la Constitution intégrant les changements à l’œuvre.